Pour une aviation vertueuse… et moins verte
Le secteur aérien dans son ensemble est engagé dans une (r)évolution. Il faut être déconnecté de l’actualité ou porter des œillères pour ne pas le constater. Partout on s’active pour témoigner de la prise de conscience de ses différents acteurs concernant les enjeux environnementaux. Partout on agit pour trouver des solutions concrètes dans le but de répondre à ces enjeux selon un calendrier désormais connu de tous.
Faut-il penser pour autant que l’aviation ait besoin d’être verte ? Pour l’organisation écologiste Greenpeace dont les membres se plaisent très paradoxalement à repeindre les avions en vert, cela semble peine perdue. Pour d’autres y compris parmi les acteurs du secteur lui même, cela parait encore faire sens.
Ces derniers devraient cependant prendre garde de ne pas se tromper d’objectif. Le secteur aéronautique doit avant tout se montrer efficace en matière de progrès environnementaux. L’adoption d’une cosmétique destinée à plaire à ceux qui l’accusent de tous les maux a peu de chances de changer la véhémence des actions destinées à mettre les avions à terre. Si le vert gagne en tout peu à peu, son épanchement tant chromatique que lexical ne doit pas nous faire oublier qu’il est effectivement avant tout une couleur politique capable de cacher sous ses nuances un activisme aux ressorts bien plus complexes qu’on ne l’imagine.
L’avion vert ne sauvera pas le climat
Greenpeace
Faisant face à la pression ambiante, le secteur aérien peut légitimement subir la tentation de se teinter de vert même si cela n’empêchera probablement pas ses plus fervents opposants de revenir à la charge contre lui.
En interne, de la base aux plus hautes sphères, d’aucun y verra pêle-mêle, tantôt un gage de bonne volonté, tantôt un pass de bonne conduite mais plus rarement une preuve de soumission. Pour celles et ceux qui souhaitent à tout prix évoluer dans le périmètre du politiquement correct, parler d’aviation verte a indéniablement des avantages dont celui de fondre nos activités dans un des mouvement sociétaux les plus en vue du moment. Ne se voilent-ils pas en réalité la face ?
On peut certes tenter d’oublier que le vert est avant tout une couleur politique, mais c’est se leurrer que de se mettre sciemment sous sa bannière en pensant que cela aidera à convaincre les plus sceptiques. A ceux qui voudraient se montrer plus royalistes que le roi, il faut rappeler que la couleur emblématique de la royauté est le bleu. Pas le vert.
Se soumettre à cette dernière , ne saurait dès lors apparaître que comme une forme d’abdication face à un entrisme idéologique dont on devrait plutôt s’interroger sur la globalité des objectifs. Pour mémoire, les mouvements écologistes referment aussi dans leurs rangs un nombre non négligeable d’anti-capitalistes et d’adeptes de la lutte des classes.
Pour ne pas prendre le risque de se perdre, le secteur aéronautique ferait peut être mieux de ne pas succomber si facilement aux sirènes d’une communication verte. Outre le fait de se détacher d’une couleur politique largement connotée et aux contours un peu flous, cela lui permettrait de revendiquer sa transition sous une couleur différente. Et pourquoi pas le bleu justement? Un choix qui serait tout aussi pertinent comme peuvent en attester certaines études,
Voilà un axe de réflexion qui peut paraître secondaire mais dont l’ importance n’est pas à négliger à l’heure où, pas une école, pas une administration, pas une entreprise n’échappe à cette lente imprégnation écologiste. Et si l’on peut éviter autant que faire se peut, de tomber inutilement dans la green-hystérisation ambiante, cela permettra de concentrer la communication du secteur aérien sur ses avancées. Car c’est finalement bien en cela que réside le véritable objectif.